pauvre langage(20/03/13)

L’appauvrissement du langage est un phénomène qui illustre bien tant le rapport au monde que celui à l’autre et à soi-même.

S’exprimer par un registre réduit, coopté, limite d’autant le « commerce » avec ce qui échappe, ce qui compromet, ce qui engage, ce qui évolue.

 

Le langage procède en quelque sorte du mystère du monde, de notre incapacité à le dire vraiment et du deuil que nous devons faire de bon nombre de certitudes. Et cela quand bien même, parfois de manière pathétique, on tente de lui faire servir quelque certitude que ce soit.

 Il est aussi ce qui permet la nuance et l’inscription dans le temps du rapport à l’autre.

La régression langagière si elle se généralise, autorise (et révèle) la régression comportementale, psychologique et pose la limite du rapport à l’autre en termes de réduction, de minima supportables.

L’appauvrissement du langage va de paire avec la forclusion du sujet.

Ce qui est alors pauvrement échangé, ce sont des mots exempts de toute charge, des mots neutralisés avec l’idée illusoire d’un partage qui a tous les aspects du lapsus. Ou bien ce sont les mots de la violence faite à soi comme à l’autre, sorte de fin de non recevoir impérative.

Les mots de l’acquiescement, eux, disent la répétition du même pour une reconnaissance par similarité et pour une neutralisation de l’autre.

Ces mots sont ceux de la frilosité intellectuelle, de l’évitement, d’une forme de protectionnisme : la réduction du contenu des échanges limite le risque de conflit, d’intrusion dans la sphère du sujet. Ce qui peut apparaître comme paradoxal puisqu’on a coutume de dire que c’est de la richesse du langage que nait la régulation des conflits....

En multipliant les « points communs » (langage, pratiques des « réseaux sociaux «, objets de communication rapides), il ne reste de commun que l’évitement de l’interaction réelle qu’induit la pratique d’un langage exigeant.

Il y a bien régression, dans la mesure où le nouveau sujet s’enferme et s’exclut y compris d’un hypothétique « lui-même », tout en restant dans la vindicte revendicative de ce qui lui est dû et ce, sur le registre du pulsionnel et de l’excès.

L’autre, en soi, qui témoigne du langage, n’est alors qu’un obstacle ou un instrument.

Il se pourrait même que se profile chez certains une tendance sadico-perverse…

 

Marc Bozec.



20/03/2013
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