complots! (13/11/20)
Le complotisme peut être lu comme une forme de réfutation et comme une forme de duplication de l’autorité. Au regard des complotistes, il n’y a rien qui fasse autorité si ce n’est eux-mêmes. Ce mouvement traduirait une sorte d’extase, de débordement, à la manière d’un rejet de trop plein, du risque de trop plein de l’Autre et de son autorité potentielle. Seul compte le propos au détriment du factuel et de toute forme de raison sainement argumentée.
Le documentaire « hold up » mérite bien son nom : il tente d’enlever toute possibilité d’autorité à qui que ce soit face à la pandémie liée au covid, il déclame les responsabilités sous forme de litanie. Mais il « se dévalise », « s’enlève » lui-même en tant qu’otage de lui-même en s’auto contaminant par des références scientifiques ou politiques alors sacralisées. Il se nourrit de cette idée baroque d’une manipulation globale et se comporte à la manière d’une métastase chargée de dévorer un peu plus ce qui resterait des cellules du social comme du politique.
La surenchère valide alors le propos sur le registre de la sidération. C’est un mode d’extraction, de réfutation de la réalité, une déréalisation doublée d’une défactualisation. C’est l’idée d’une responsabilité illimitée de notre société qui est le terreau du complotisme. Est en jeu une forme de fascination dans l’excès du propos, lequel finit par se suffire à lui-même, par delà les faits (c’est là le fondement même du mouvement Qanon né aux Etats Unis).
Par un effet de réversibilité inhérente à son propos, ce mouvement risque de s’auto- phagocyter dans une dynamique qui ressemble à s’y méprendre à celle du thanatos freudien.
Serait-ce là l’expression suprême du sujet autoréférencé ? On peut le supposer à condition d’admettre qu’il y a là de la jouissance et de l’excitation.
Marc Bozec
ps :
En parlant de complot, qu'on se rappelle la réaction de Louis XVI qui ne fit rien d'autre que de comploter face aux présumés comploteurs de l'Assemblée Nationale, lesquels voyaient du complot partout...