Le lion est mort...( 05/08/15)

 

La levée de bouclier qui s’est opérée suite à la mort du lion Cécil éclaire encore une fois nos modes de réaction. Outre le fait qu’il s’agit à mon avis d’un acte ignoble, c’est bien la réaction et son mode de propagation qu’il faut interroger. Au fin fond de l’Afrique qu’un lion soit abattu n’a rien d’extraordinaire, on sait d’ailleurs que certains de ces animaux y sont élevés aux fins de satisfaire les pulsions morbides de quelques richissimes désœuvrés en mal de sensations.

Ce qui s’est encore une fois révélé, c’est l’émotion, qui gouverne en grande partie nos vies sociales.

Cette même émotion peut être posée comme une issue envisagée face à un cul de sac comportemental : que faire en effet face à l’injonction qui est faite à l’individu de se produire lui-même à flux tendu ? Comment réagir face à la confusion des registres intimes, privés et professionnels ?

 Nous avons longuement évoqué la fragmentation comme solution d’urgence, mais il semble qu’elle ne suffise pas et qu’il faille, bon gré mal gré, faire encore du sens social, et ce de manière ponctuelle, dans un cadre dans lequel l’autre n’est pas une menace, mais un élément dans un chorus étendu.

Somme toute la bonne vieille répétition du même comme confirmation de la différence et l’émotion comme porte de secours pour un sursaut d’individualité impactant dans l’instant. Le mode de fonctionnement de face book qui inclue le partage de données souvent intimes en dit long à ce sujet : il convient d’aimer, de réagir dans l’instant pour ne pas briser le lien…

Non que je ne conteste que l’émotion puisse être un important vecteur de mobilisation, mais  ce que je crains c’est qu’elle ne se substitue au politique dont on sait qu’il a à jouer un rôle symbolique déterminant. L’émotion se décline dans le temps de l’immédiateté quand le politique à affaire à un temps qui devrait s’inscrire dans la durée, notion qu’au demeurant il semble perdre de vue.

La propagation de l’indignation laisse elle aussi songeur, surtout si on l’éclaire sous le jour de l’immédiateté et du flux généré. Elle donne à penser qu’en permanence il y a de l’hyper connexion dont je ne suis pas loin de penser qu’elle relève de l’addiction. Il y aurait sans doute alors un manque à être face à l’autre, neutralisé par un partage virtuel qui pose une appartenance sociale fluctuante et désincarnée, dominée par le flux dans le partage. Somme toute une sorte d’inflation dans la bourse des valeurs virtuelles qui tournent autour du concept mythologique et désincarné de l’individualité.

Le risque de ce mode de fonctionnement convoquant l’immédiateté et l’émotion, est que tout finisse par se perdre et se valoir dans un flux permanent et sursaturé de réactions qui sont amenées, par la profusion, à se neutraliser les unes les autres…

Marc Bozec.



06/08/2015
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