La mouche du coach (09/04/12)

La mouche du coach.

 

Eduquer ses enfants, suivre un régime, meubler sa maison, régler sa  vie sentimentale, voilà qui ne semble plus pouvoir se faire sans le recours à un coach.

Le concept de coach se trouve extrait de son sens premier, à savoir entraîneur sportif responsable des performances d’une équipe, pour couvrir celui de conseiller, mais aussi de manager d’un individu.

 

Ont recours à un coach de nombreuses personnes qui peinent à gérer certains domaines de leur existence, domaines dans lesquels ils ne sont pas « performants », puisque le plus souvent en échec…

 

Il faut mettre cela en rapport avec l’injonction sociale à la réussite et à la performance. Pour être heureux, il faut réussir, et cela en donnant toujours plus : plus à voir, plus à consommer, plus de soi au travail. Les conseillers de Nicolas Sarkozy ne s’y étaient pas trompés en créant le « travailler plus pour gagner plus ». Ce n’était pas tant la formule dans son intégralité qui impactait, mais ce plus répété, diapason de nos agitations quotidiennes, qui faisait écho à une volonté d’excès à peine dissimulée par l’édiction du paradoxe du « développement durable ».

 

L’homme devenant ainsi pressé mais prudent, prudent, mais pressé…

Il se trouve que la course à la consommation tout azimut ne va pas forcément de paire avec le recul nécessaire à la compréhension de certaines situations, ni avec la mise en place d’une éthique, et encore moins avec la prise en charge de la part symbolique qu’il nous convient d’assumer en tant que parents.

 

La consommation devient une limite là où elle était pourtant vantée comme émancipatrice.

Et hors des limites, une fois ces dernières dépassées, on se retrouve plus ou moins hors-jeu (pour en revenir à une terminologie sportive) : hors du jeu de la pensée, hors d’une mise en jeu de soi raisonnée, et parfois même hors du « je », hors sujet…

Ces limites dépassées, il n’est pas aisé de les franchir à nouveau dans l’autre sens : elles ont quelque chose de fatal, de quasi irrévocable. Il faut alors trouver quelqu’un d’extérieur qui posera de nouvelles limites, celles-ci définies comme objectifs à atteindre, et qui soient valorisantes et productives, tout en extrayant de toute forme de culpabilité. C’est là que le coach intervient et  joue le rôle d’un régulateur, d’un rééducateur, presque d’un directeur de conscience.

 

Sans remettre en cause la nécessité de trouver une solution à la difficulté d’être, la question qui se pose est encore celle du bien fondé d’une sorte de sparadrap sur une jambe de bois : à ne traiter que de symptômes et ce de manière allopathique, on ne fait jamais que reporter les champs d’expression de la pathologie. Et en l’occurrence, il semble bien qu’elle soit à lire du côté d’une crise de la reconnaissance de soi et de la dépression.

Alors, peut être que le coach a encore quelques belles années devant lui, avec le sentiment d’avoir, comme la mouche de la Fontaine, tout le prestige à retirer du mouvement produit…

 

 

Marc Bozec.



08/04/2012
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