Du genre : réponse à un commentaire

La notion de genre est une notion fourre-tout (et cela sans mauvais jeu de mot) : ce qu’elle recouvre est assez vaste pour que l’on s’y perde.

Genre : masculin, féminin ; genre humain, se donner un genre, avoir mauvais genre : on voit que les acceptations se recoupent tout en étant différemment connotées. Cependant les unes et  les autres procèdent de l’apparence, même si la génétique est un marqueur significatif dans l’un des cas.

En tout état de chose, genre humain excepté, on a le choix d’un genre, entendu ici comme le choix d’une apparence.

Si le sexe est déterminé et que l’on ne peut en changer vraiment, le genre, lui, procède du choix et est souvent revendiqué comme tel. Le sexe est un invariant identitaire et l’affirmation du libre choix à en disposer ne changera rien. Il relève en quelque sorte d’un destin incontournable et radical.

Ce qui interroge, c’est la revendication d’appartenir à  un genre autre que celui vers que la sexuation oriente : il en va certainement d’un choix, et c’est l’expression de ce choix qu’il faut prendre le temps d’interroger.

Il existe des espaces de revendications qui posent l’inadéquation entre le sexe, l’appartenance à un sexe et la façon dont la sexuation est vécue. Il est intéressant d’y constater la complexité du rapport à l’identité et le souci de désignations « politiquement correctes » qui se perdent en appellations diverses dont les formulations font appel à une caution scientifique. (Qu’a donc la science à voir là-dedans ? Il y aurait, de plus beaucoup à dire à son sujet, mais là n’est pas le propos. On peut citer au passage Jean pierre Lebrun : « L’objectif de la science est de produire des énoncés qui peuvent se délester de l’énonciation qui les a produits »).

L’intérêt de ce qui se révèle, là encore, c’est la complexité du rapport à l’identité, la revendication à une autodétermination qui centre l’individu sur lui-même comme étant sa propre référence.

Le problème est celui de la reconnaissance : là où il y a surinvestissement égocentré, il y a désinvestissement du sujet et forclusion. D’où la revendication d’un individu au regard d’un genre. Il y a alors une instrumentalisation de l’individu qui s’exprime dans la revendication du genre. Il y a une volonté paradoxale de disparaître à soi. Il y a aussi instrumentalisation de soi dans la revendication et cela proportionnellement à la véhémence de  cette dernière.

« La révolution sexuelle n’aura peut-être été qu’une étape vers la transsexualité(…) une fois passée l’orgie, la libération aura laissé tout le monde en quête de son identité générique et sexuelle, avec de moins en moins de réponses possibles étant donné la circulation des signes et la multiplicité des plaisir ».(Jean Baudrillard)

La « trans » peut-être comme moyen de se consommer soi-même dans la mouvance générale de la consommation ultime et radicale. Le genre comme revendication paradoxale, comme vecteur de la disparition face à l’Autre et face à soi-même. Pour reprendre une expression de Jean Baudrillard : « nous sommes tous des transsexuels », nous sommes tous en transsidentité fragmentaire et séquentielle face aux simulactes, lapsus d’une identité vacillante. Et nous sommes loin d’avoir le panache des dandys, d’un Brummel, d’une Castiglione ou d’un Wilde, qui avaient transfiguré leur existence pour en faire une œuvre d’art…

Marc Bozec.



16/03/2012
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